«Le communisme est l'avenir
radieux de l'humanité.» Ce slogan de la
défunte Union soviétique est,
contrairement à des apparences
trompeuses, d'une criante
actualité. Car le communisme
n'est pas d'abord une théorie, il
est une praxis: c'est pourquoi il
ne cesse de se modifier, comme
un « mutant », disparaissant ici
pour réapparaître ailleurs sous
des oripeaux différents.
Car, au fond, qu'est-ce que
le communisme marxiste-léniniste? C'est le triomphe absolu
du matérialisme athée, dans
lequel chaque individu humain
ne cherche que son propre bonheur
sensible. Et Marx imaginait que tout
homme, dans le cadre du communisme,
bénéficierait d'une abondance significative
de biens matériels.
N'y a-t-il pas là une description saisissante
de notre société capitaliste ultralibérale? Dieu et l'âme immortelle, la vertu et la
vie spirituelle y sont comme des souvenirs
en voie d'extinction rapide. Chaque individu,
muré dans sa petite bulle personnelle, sans
se préoccuper des autres ni
d'un quelconque bien commun,
recherche ce qui va le satisfaire,
lui donner un plaisir immédiat.
D'où l'effrayant succès de la pornographie
et de la drogue.
Quant aux biens matériels,
nous en sommes littéralement
submergés: la société produit
des biens sans mesure, les individus
en acquièrent sans limites.
L'hyper «société de consommation» est comme le rêve réalisé
du communisme, ou plutôt son
cauchemar le plus abouti.
Mais il ne faut pas oublier les
leçons de l'histoire. Le communisme
a entraîné une société
policière, une dictature de
contrôle et de surveillance, et finalement
plus de quatre-vingts millions de morts.
Or, c'est exactement l'évolution que nous
sommes en train de vivre. On nous promettait
une société de liberté, d'anonymat, de
tranquillité, et voici que nous sommes de
plus en plus environnés de policiers lourdement
armés, de militaires qui patrouillent,
de vigiles omniprésents, sans oublier les
millions de caméras qui scrutent chacun de nos faits et gestes, le moindre de nos
déplacements.
Et, demain, grâce aux algorithmes et à
l'intelligence artificielle, la caméra saura qui
nous sommes et, en fonction de nos activités
précédentes, n'hésitera pas à nous
dénoncer si nous prétendons réaliser une
activité «politiquement incorrecte». La
dictature communisto-capitaliste chinoise
est en train de mettre au point
un tel système de contrôle
général et centralisé, mais ne
doutons pas que nos sociétés
«capitalisto-communistes» ne
finissent par y arriver elles aussi.
Il y a plus de trente ans,
dans un de ses cours à Écône,
Mgr Lefebvre faisait remarquer qu'au fur et
à mesure que la conscience morale s'effrite,
s'efface, il faut la remplacer par des policiers.
Et il proposait cette boutade prophétique:
«Lorsque la vie chrétienne aura définitivement
disparu, et avec elle la conscience
morale, il faudra sans doute mettre un policier
derrière chaque individu»
Le grand Donoso Cortès l'avait dit magnifiquement
avant lui, le 4 janvier 1849, dans
un discours au Parlement espagnol :
«Il n'y
a, Messieurs, que deux répressions possibles: l'une intérieure, l'autre extérieure;
la répression religieuse et la répression
politique. Elles sont de telle nature que,
lorsque le thermomètre religieux s'élève,
le thermomètre de la répression baisse, et
que, réciproquement, lorsque le thermomètre
religieux baisse, le thermomètre politique,
la répression politique, la tyrannie
monte. C'est une loi de l'humanité, une loi
de l'histoire.»
Ne croyons donc pas que le communisme
ait disparu, parce que l'Union
soviétique a sombré. Sa forme primitive,
grossière, imparfaite, est certes en voie
d'effacement. Mais l'idée centrale
du communisme, ce matérialisme
athée et hédoniste, est
le projet même de la société
moderne.
Et puisque les lois qui
régissent la nature humaine
sont immuables comme Dieu,
nous devrons subir la conséquence nécessaire
de cette destruction de la conscience
morale et religieuse : la dictature policière,
le contrôle généralisé, ce que George
Orwell, dans son génial et prophétique
roman 1984, nommait Big Brother, suivie
de la répression féroce des « dissidents
», de ceux qui voudront continuer à
aimer Jésus et à désirer qu'il règne sur les
hommes.
Si donc la société ne redevient pas chrétienne,
si elle ne revient pas vers Dieu, alors
le communisme, «intrinsèquement pervers», comme l'avait justement qualifié
Pie XI, sera bien, en un nouvel avatar,
«l'avenir radieux de l'humanité», c'est-à dire
sa destruction.
Abbé Christian Bouchacourt †, Supérieur du District de France de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X